mercredi 3 décembre 2014

DE TAMTATOUCHTE A AIT BEN HADDOU mercredi 21 mai (jour 10)

Vous trouverez ici le tracé du jour ITINERAIRE de 324km
durée totale : 9h13
durée de déplacement : 8h54
vitesse moyenne : 36 km/h
altitude max : 2949m



Réveillé par le muezzin à 4h30 puis le braiement d'un âne et enfin les aboiements d'un chien, je me réveille définitivement vers 8h30. Le ciel est bleu, il fait déjà bon et je ne me lasse pas du panorama offert. Je prends un petit déjeuner en terrasse en compagnie de deux personnes à côté de moi, ils sont arrivés hier soir.




La conversation s'engage. Elle a déjà travaillé au Maroc auparavant et elle est là depuis deux mois dans l'attente de la validation d'une demande d'adoption. Elle m'explique qu'elle est assistée par une avocate marocaine et elles ont choisi de faire front face à l'administration et de ne pas céder aux bakchichs ... forcément ce sera plus long.

9h30 : Il est temps de me préparer pour faire ma grande boucle jusqu'à Dadès puis de filer à Ouarzazate. Un peu ambitieux cet itinéraire...




Du jaune, du vert, du rose, du bleu


Que dire d'autre que c'est magnifique ce matin! 
C'est la saison de la moisson du blé, la légère brise matinale anime les reflets changeant de vert et jaune dans la vallée. Seules les femmes travaillent dans les champs, courbées à faucher le blé à la main. Les hommes que je vois ce matin vaquent à leur activité favorite : attendre. Quoi? je ne sais pas mais ils sont debout ou assis et restent là!

Même à bonne distance, les femmes restent méfiantes dès que l'on sort l'appareil photo. Certaines vont se retourner en attendant notre départ ou renforcer leur protection du visage avec leur foulard.

Je roule en direction d'Agoudal sur un revêtement parfait dans un paysage toujours aussi grandiose. Je me retrouve à suivre un véhicule immatriculée en Allemagne, un 4X4 dont le plateau arrière supporte une cabine type caravane, un camping-4x4 en sorte. Selon nos arrêts, on se double et se redouble puis on stoppe au même endroit pour y faire une photo. En contre-bas de la route, plusieurs femmes font de la lessive dans un bras aménagé du cours d'eau. L'une d'elles est très volubile et souriante mais on ne se comprend pas. La plus jeune traverse la route avec une brouette chargée de tapis propres qu'elle dépose sur de grosses pierres exposées au soleil pour les faire sécher. L'homme allemand, la soixantaine, prend des photos du paysage alors que sa femme est restée dans la voiture. La jeune marocaine entame son retour avec sa brouette vide et passant près du 4x4, je vois un sachet plastique rouge tendu par la vitre ouverte. Un sachet qui ressemble à celui de tranches de pain mie ou de brioche mais seulement au tiers plein. La marocaine ne se fait pas prier pour le récupérer mais je trouve l'attitude de l'allemande choquante, telle une maîtresse à sa servante lui confiant ses restes de repas, sans parole, sans sourire. Des connards.



J'attaque maintenant une route avec un fort dénivelé positif qui m'amènera à près de 3000m d'altitude aujourd'hui. Ce sera d'ailleurs l'occasion de vérifier que le moteur n'en souffre pas bien qu'équipé d'un carburateur. Il est top ce TDM! Là encore, le paysage de montagnes est splendide et j'ai encore la sensation d'être privilégié car je roule quasiment seul pour profiter de ce spectacle. Un vrai bonheur pour un motard.








Arrivée à Agoudal, le point le plus nord de la boucle, je vais pouvoir entamer le retour vers Dadès. Mais maintenant c'est la piste, la vraie! Avant je rencontre 2 vieillards dans le village avec qui je discute cinq minutes. On échange avec les quelques mots d'arabe que j'ai acquis et les bribes de français qu'ils ont appris durant le protectorat. Ils me font part combien ils apprécient les français, me racontent quelques anecdotes de bataille et m'indique le chemin à prendre. J'ai filmé toute la scène mais je me rendrai compte plus tard que je n'avais pas activé la prise de son, frustrant. Il me reste quand même leurs visages rieurs et bienveillants de ce bon moment.




















J'attaque le chemin et rencontre rapidement un groupe de motards équipés de moto enduro. Il y a 3 anglais qui vont vers Agoudal et 1 allemand en KTM qui va dans la même direction que moi. Après quelques échanges et une cigarette, on se met en chemin. Même si je me sens plutôt à l'aise sur les premiers km roulants, je ne me fais pas d'illusions sur le fait que mon compagnon teuton va bientôt filer seul. Sa moto est parfaite pour ce terrain et il n'est pas chargé de bagages. La piste fait la largeur d'un véhicule mais avec des bas-cotés , elle est faite de cailloux de petit calibre, ça ne va pas durer...
Au moment où l'allemand accélère et s'éloigne, nous accédons à un vaste plateau avec un petit espace herbeux au fond.



J'aperçois encore un instant la KTM au loin qui disparaît finalement. Je m'arrête pour me désaltérer. Un enfant s'était mis à courir après lui mais il me repère vite et vient maintenant à ma rencontre. Je suis à au moins 400m. Je vois un deuxième enfant courir derrière. Arrivés à ma hauteur, je découvre deux jeunes garçons, pieds nus, sales. L'un porte une grande veste d'adulte. Le grand doit avoir 7-8 ans et le petit autour de 4 ans. Seul le grand parle mais je ne suis pas sûr que ce soit de l'arabe, je ne reconnais aucun mot ni intonation, peut être parle t il berbère. En tout cas son élocution n'est pas fluide et j'ai l'impression d'être face à des "enfants sauvages". Au Maroc, il est facile de constater que des efforts importants sont faits pour que tous les enfants soient scolarisés, mais certains échappent malheureusement au système. Ceux-ci sont surement contraints par la pauvreté de leurs parents à garder toute la journée le troupeau de moutons.
Ils me font signe pour quémander de la nourriture mais je n'ai que des vêtements à leur proposer. Je leur donne un polo et une paire de tongues que le grand enfile aussitôt, il en est ravi. Mais l'incongruité de ce présent, si dérisoire me rend bien triste face à leur condition de vie.
Ils s'appellent Mohamed et Rachid.
Je repars.




La piste devient plus cassante et mon rythme de vitesse diminue, la moto est trop lourde pour être complètement à l'aise et je dois me méfier. La piste serpente maintenant le long des versants de montagne, je dois être vigilant à ne pas freiner trop brusquement dans les cailloux pour éviter de tomber dans le vide. Ca monte à nouveau et je vais être quasiment seul jusqu'à la redescente dans la vallée. Je croiserai quelques bergers ou bergères isolés et un groupe de 4x4 français remontant vers Agoudal. Le paysage est époustouflant, grandiose, multiforme, très aride, vertigineux. S'arrêter au milieu de ces sommets qui vous écrasent dans un silence absolu donne le vertige et la sensation d'être.


La pente est très abrupte








Ma TDM est fantastique!
Juste après le retour dans la vallée où coule l'oued Dadès, je m'arrête à hauteur d'un groupe d'hommes en train de bêcher un champ pour y planter des pommes de terre Eh oui, de ce côté ça change, ce sont les hommes qui bossent. Il est environ 13h, il fait une chaleur écrasante. Ils sont tout sourire et joviaux malgré leur travail sous un soleil de plomb. Deux s'approchent de moi et m'invitent aussitôt à boire un thé. Pensant qu'il le servirait près du champ, j'accepte. Seulement il faut aller à leur cabane située 200m en arrière. Je commence à bouger la moto mais ils me font signe de la laisser là. Instinctivement, je crains pour mes affaires libres d'accès sur la moto ... tellement pas habitué à une telle générosité, je reste encore sur mes gardes. Si je pars maintenant, ils le prendraient comme un affront et le risque est quand même minime. Les hommes n'ont de cesse de me rassurer et m'indiquent que la moto n'a rien à craindre. Arrivé à la cabane, je suis accueilli par un homme qui prépare le déjeuner, il parle suffisament français pour bien se comprendre. Il s'appelle Hamad et semble être un peu le patron du groupe. Il prépare le tajine à l'aide d'un gros réchaud dans une cabane faite en parpaings. C'est un vaste bazar, méli-mélo d'outils et de gravas avec un puit au fond. Il me fait un thé accompagné d'un bol dans lequel il verse de l'huile d'olive. Je lui demande pourquoi, il me dit que c'est une sorte de collation, on trempe le pain dans l'huile (avec la main droite bien sûr!) et on boit du thé. Il me propose ensuite de rester manger avec eux. Il est déjà 13h30 et la route pour Aït Benhadou est longue,  je dois refuser avec regret tant la bonté et la générosité de cet homme sont sincères et désintéressées. Il m'aura fallu plusieurs expériences pour comprendre cela et laisser de côté mes réflexes de crainte pour mieux apprécier leur volonté de partager un moment sans attendre quoi que ce soit en retour.


Hamad en plaine préparation du tajine
De retour à la moto, je discute avec les hommes du champ et leur propose une bouteille d'eau qu'ils acceptent volontiers.




Le temps de prendre une photo et c'est reparti.

Depuis mon retour dans la vallée, j'ai retrouvé une route bitumée qui suit la vallée mais je reste encore fasciné par la piste de montagne que je viens de faire, ça restera un moment fort de mon séjour, un pur plaisir de motard. A faire! (à moto ou en 4x4)





J'arrive en suite dans les fameuses gorges de Dadès qui pour moi sont autrement plus belles que celles de Todra. Elles offrent un paysage plus contrasté en couleur et en forme, avec des à-pics importants.
Les points de vue les plus spectaculaires se situent entre Aït Hammou et Aït Assi avec notamment le lacet de route qui descend au coeur des gorges surplombées par un hôtel placé en bord de falaise.









Un peu plus bas vers Tamellalt, apparaissent des formations géologiques surprenantes appelées ici "les doigts de singe".






Je suis presque au bout de la boucle Todra-Dadès, j'avais l'intention de rejoindre Kalaat M'Gouna par la vallée des Roses mais j'ai manqué l'intersection à la sortie d'Ait Ibriren, je passerai donc par Boulmane-Dadès puis Kalaat où les préparatifs de la fête des roses battent leur plein ce jour-là. Mais je me sens fatigué après ce parcours encore très riche et j'ai hâte d'arriver. La fin du trajet se fait sur une route quasi rectiligne jusqu'à Ouarzazate, assez encombrée de circulation et bordée presque tout du long d'habitations. 
J'entre dans Ouarzazate. Impression étrange d'une ville calme avec de larges boulevards bien propres où tout semble un peu figé, en attente. Est ce du à la présence des plus grands studios de cinéma du Maroc ou comme je l'apprendrai plus tard au fait qu'une communauté française très importante est présente dans cette ville? Bref dans l'immédiat je file vers Aït Ben Haddou rejoindre mon hôtel. Je suis épuisé, je viens de passer plus de 9h sur la moto. Cette étape était trop ambitieuse et je regrette au final de ne pas être resté manger avec Hamad et ses compagnons puis trouver un logement dans le coin.

J'avais choisi la kasbah Isfoula selon les avis trouvés sur Booking.com. L'hôtel est beau et bien décoré un peu à l'écart du centre d'Aït Ben Haddou et semble plutôt confortable sachant que j'envisage de rester 2 jours dans la région. 3 personnes pour m'accueillir sur le perron à attendre. Je serai seul client ce soir, une habitude. Ça commence mal, ils me donnent la chambre la plus éloignée de l'accueil, avec un wifi quasi inexistant. Petite parenthèse wifi: ça parait futile pour ce type de voyage mais il faut déjà savoir que tous les établissements le proposent, avec plus ou moins d'efficacité selon les cas et puis c'est tellement pratique pour communiquer avec ses proches sans exploser son forfait data.
Je termine pour la chambre : peu d'eau chaude, un filet d'eau, pas de rideau sur la fenêtre de salle de bain, un réservoir de wc qui fuit, le pommeau de douche cassé... après réclamation j'aurai droit à un verre d'alcool de figue offert! Surement trop fatigué pour exiger plus, je sais en tout cas que je ne resterai pas une autre nuit ici. Quant à la cuisine, tant vantée dans les différents avis postés sur Tripadvisor ou Booking, elle n'a rien d'exceptionnel et permet juste de retrouver des recettes occidentales pour varier de la cuisine marocaine. Bref, j'ai passé des nuits au Maroc dans des endroits moins clinquants mais avec un meilleur service et pour moins cher.




lundi 1 décembre 2014

DE ERFOUD A TAMTATOUCHTE mardi 20 mai (jour 9)

Vous trouverez ici le tracé du jour ITINERAIRE de 222km 

Après un bon petit déjeuner et les au-revoir, surtout avec Abdoul qui aura bien animé mes deux jours à Erfoud, je pars vers 10h afin de rejoindre Tineghir par la route sud passant par Rissani et Afni. Celle plus au nord est dite des 1000 casbahs mais je préfère la route la plus aride qui me fera traverser là encore des paysages somptueux d'espace et de grandeur avec des sommets constamment présents en fond de décor. Je croise peu de monde, peu de voitures et la végétation est très éparse jusqu'à Afni. 






Ce sera mon point le plus au sud du Maroc dans qq jours

















Au loin j'aperçois une femme qui traverse la route devancée par son troupeau de chèvres noires. Nous sommes au milieu de nulle part, je ne vois aucune habitation aux alentours. Arrivé à sa hauteur je ralentis, elle se retourne, je m'arrête. Elle se dirige vers moi et par signe, me demande aussitôt de l'argent ou à manger. Dans un premier temps je refuse puis je me ravise en pensant à son extrême pauvreté, sa condition de bergère sous une chaleur importante. La femme est grande et élancée, porte des vêtements propres ainsi que plusieurs bagues et tient dans ses bras un petit fagot de bois. Je connais la controverse pour ne pas favoriser l’aumône mais voilà cette fois je cède et lui donne 4Dh et un polo neuf (merci Jérôme). Elle m'autorisera alors de pouvoir la prendre en photo après avoir repositionné son foulard devant son visage, puis s'en retourne vers son troupeau en direction de nulle part.



Plus loin, j'aperçois des dromadaires en liberté qui broute le feuillage des quelques arbres qui résistent dans cet environnement hostile.




Camouflage naturel pour le petit dromadaire
J'apprendrai que ces dromadaires ont surement un propriétaire qui les laisse pâturer librement jusqu'à passer plusieurs jours à les trouver si nécessaire.



Après avoir passé Afni, je m'arrête pour acheter des abricots vendus par des gamins en bord de route, une douzaine pour 5Dh. Ce sera mon repas du midi que je déguste tout en roulant dans un paysage magnifique avec un vent qui souffle assez fortement, ce qui soulève le sable en mini tornade.





En approchant de Tinghir, le paysage change et des coins de verdure, des palmiers apparaissent. La ville est perchée sur une colline au bord d'une vallée verdoyante. Les constructions sont en pisé de couleur ocre offrent un contraste fort avec la végétation.


Arrivée à Tinghir





Direction les gorges de Todra par une route qui longe d'abord la vallée luxuriante de Tinghir puis suit des lacets en altitude. Au court d'une pause je suis approché par Mohamed, jeune lycéen qui attend près d'un bus scolaire de pouvoir rentrer chez lui. Il parle très bien français, nous échangeons un moment et lui demande des conseils pour me loger ce soir. J'ai l'intention de faire la boucle reliant les gorges de Todra à celles de Dadès mais Abdoul m'avait indiqué que cela serait vraisemblablement impossible car une partie de la route est difficilement praticable. Mohamed me conseille un gîte situé dans les gorges et où l'on pourrait se retrouver ce soir.





J'avance jusqu'à Todra par une route dégradée qui traverse quelques villages avant d'arrivée au pied des fameuses gorges qui se caractérisent par un passage étroit à travers la montagne. Le corridor de falaises culmine à 300m et ne fait pas plus de 15-20m de largeur par endroit.


Traversée des gorges de Todra

La route est longée par une rivière. Il y a des échoppes, un hôtel et quelques restaurants. L'endroit spectaculaire attire pas mal de touristes. 



Hôtel dans les gorges

C'est impressionnant mais le côté touristique du lieu me rebute pour y passer la nuit, je poursuis sur une route en très bon état avec des points de vue magnifiques. J'arrive dans le village de Tamtatouchte. Bien qu'il ne soit que 16h30, je me décide à trouver un logement, je me sens fatigué et je vais en profiter pour prendre mon temps et me reposer. Il y a plusieurs offres d'hôtel et je finis par choisir l'auberge Bougafer chez Ali après avoir échangé avec lui sur les conditions de logement. Il n'est pas très difficile de négocier, je suis le seul client de l'hôtel voire du village. Pour 250Dh, j'ai une chambre, un dîner et un petit déjeuner : imbattable! Ali mettra en route sa chaudière au bois à l'occasion pour que je puisse prendre ma douche. En attendant je profite d'une superbe vue sur la vallée.


Vue depuis la terrasse de chez Ali


Incroyable ces variations de verts formés par les parcelles de blé.




Ali prend le temps de discuter en m'offrant le traditionnel thé à la menthe d'accueil. Il m'apprend qu'il organise des randonnées et accueille régulièrement des groupes dans son hôtel. Je le questionne sur ma volonté d'accéder à Dadès par la boucle nord et m'affirme que c'est bien sûr possible, même si le chemin est parfois étroit et caillouteux, il est déjà passer avec une Logan! Me voilà rassurer, il faudra que je prévienne Abdoul mais aussi Lonely Planet qui le déconseille. 

Alongé sur la banquette en terrasse, j'en profite pour lire un peu avec vue sur le village.


Moment de détente

Vue sur Tamtatouchte

Ali me servira un très bon dîner en terrasse suivi de plusieurs thés. Il me laissera également utilisé son ordinateur pour naviguer sur internet puis dodo.




La vallée au crépuscule

Si vous passez par là, je vous conseille vivement une halte chez Ali qui vous étonnera par son accueil, sa serviabilité et sa connaissance de la région. Ci dessous les coordonnées: 

Auberge Bougafer (auberge, restaurant, camping) 
Chez Ali
à 18km des gorges de Todra
Tamtatouchte
Tèl : +212 6 70 22 35 36
mail : auberge-bougafer@hotmail.com
site : www.aubergebougafer.com

La piscine était en construction et certainement terminée depuis.



chambre

salle de bain
salle de bain